Interview / 3 questions à Jacky Ickx

À vous voir manier cette Beetle sur un circuit, on se dit que le talent est éternel...
Oh, vous avez, on m'accorde un certain talent, mais j'ai roulé à une époque où tout était possible, même si je suis surtout heureux d'y avoir survécu quand je compare les conditions de sécurité de l'époque et celles qui sont en vigueur sur ce circuit moderne. Mais je n'envie pas les pilotes de F1 actuels. C'est si compliqué, ces F1 ! Elles sont moins physiques que celles que j'ai pu conduire, mais intellectuellement, c'est d'une complexité incroyable. Le plus étonnant, c'est que l'automobile n'a jamais été pour moi une véritable passion. J'ai fait cette carrière un peu malgré moi.

Ah bon ? Mais qu'est-ce qui vous passionne alors dans la vie, si ce n'est pas la course et l'automobile ?
L'Afrique ! Par les Paris-Dakar auxquels j'ai eu l'occasion de participer, j'ai découvert des pays fantastiques, en particulier le Mali, où les gens sont heureux alors qu'ils n'ont rien. On s'y lève avec le soleil, on s'y couche avec la lune et il règne une sérénité incroyable alors que le dépouillement est total. Ça a été pour moi une véritable révélation et pouvoir contribuer avec les moyens qui sont les miens à les aider un peu, c'est là la vraie passion de ma vie. J'y retourne d'ailleurs aussi souvent que possible et c'est à chaque fois un vrai bonheur.

Le Dakar, justement, comment y êtes-vous venu, vous qui étiez jusque-là plutôt typé « circuit » ?
C'est venu très simplement en discutant autour d'une table avec mon ami Claude Brasseur, on s'est dit simplement : «Et si on tentait le coup ?» On s'est lancés et c'est une formidable aventure qui a duré 6 ans. Pour notre première participation, j'avais demandé à mon ami Jean Todt de former Claude aux secrets de la navigation. Il faut croire que ses conseils étaient avisés, puisque nous avons ensuite gagné ensemble. C'est un des plus beaux chapitres de ma carrière et je suis très reconnaissant à Thierry Sabine de m'avoir ouvert les portes de l'Afrique.