Le succès a souvent de nombreuses racines, et le monovolume est l’une de ces réussites des années 80, 90 et 2000 dont plusieurs affirment avoir fourni l’ADN. Les faits : plusieurs constructeurs automobiles ont expérimenté le concept du monospace : un mélange pratique de break et de fourgonnette, pour ainsi dire. À la fin des années 70, il y avait la Lancia Megagamma, ou bien plus tôt la Fiat 600 Multipla. Cependant, les premiers à proposer effectivement un monospace à la vente, en 1984, ont été aux États-Unis Chrysler, avec la Voyager, et en Europe Renault, avec l’Espace.
Des racines américaines
Ce que peu de gens savent, c’est que les deux ont en fait germé de la même graine, qui avait été semée auparavant chez Ford, sous la direction de Lee Iacocca, alors PDG. Quand on lui a indiqué la porte et qu’il a déménagé chez Chrysler, il avait emporté quelques plans.
Le département européen de Chrysler, Simca, avait également un monovolume en projet au même moment. Lorsque les Américains ont vendu leur division d’outre-mer à PSA en 1979, le projet de monospace s’est retrouvé via-via chez Matra, un conglomérat français qui a tout construit après la Seconde Guerre mondiale, des fusées aux vélos électriques. Et aussi des voitures, comme le Rancho ou la Bagheera. Ils ont vu du potentiel dans cette idée. En se basant sur le Talbot Solara, ils ont construit un prototype (photo ci-dessous), dans lequel l’Espace ultérieur était déjà clairement reconnaissable.
Matra l’a apporté à la direction de Peugeot, mais là, ils avaient autre chose en tête. La récente fusion avec Citroën et l’intégration de Chrysler Europa (rebaptisée Talbot) ne se sont pas déroulées sans heurts. La dernière chose qu’ils voulaient y faire était d’investir de l’argent dans un projet non testé comme le monospace.
L’Espace est née
« Allons donc sonner chez le voisin », en l’occurrence Renault. C’était fin 1982. Les Parisiens ont bien reçu l’idée et se sont immédiatement mis au travail. Ils n’ont plus beaucoup changé d’aspect ni de concept, mais ils ont mis en place un intérieur modulaire, avec même des sièges avant qui peuvent être pivotés de 180 degrés. Ils l’ont appelé Espace et ont commencé la production en 1984, quelques mois après que Chrysler ait lancé le Voyager.
Au début, Peugeot a dû se réjouir de ne pas s’être brûlé les doigts, car dans ses premières années, l’Espace innovant ne suscitait que peu d’intérêt. Cela a changé dans les années 1990, lorsque Renault a repris l’initiative et a traduit le concept en modèles plus petits, avec la Twingo et la Mégane Scénic. Le monospace est devenu la tendance de l’époque, et souvent à la hâte, pratiquement tous les grands constructeurs automobiles ont copié l’idée. Volkswagen est venu avec la Sharan, Toyota avec la Previa et… Peugeot avec la 806, en collaboration avec le groupe Fiat.
Au cours de la dernière décennie, cependant, l’intérêt pour le monovolume s’est effondré ; tout à coup, les familles nombreuses ont voulu un crossover. La cinquième génération d’Espace, lancée en 2015, a également suivi la tendance, avec le résultat lamentable qu’elle est simplement devenue une voiture familiale moins spacieuse.
La fin de Matra
L’histoire de l’Espace a également marqué le domaine industriel. Renault a sous-traité la construction des trois premières générations à Matra, permettant à leur usine de Romorantin de tourner à plein régime. Le numéro IV a cependant déménagé à Sandouville. Comme consolation, Matra a été autorisée à produire l’Avantime. Ce crossover entre un coupé et un monospace a été un échec total. Alors ils ont débranché la prise et immédiatement éteint les lumières de l’ancienne usine Matra. Fin de l’histoire.
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