Essais blog / Qu'avons-nous pensé de la Lamborghini Huracan Tecnica ? V10/10

Intrinsèquement, la Lamborghini Huracan fait presque office de dinosaure en comparaison de ses concurrentes les plus récentes : la Ferrari 296 GTB et la McLaren Artura, toutes deux hybrides rechargeables. Ultime évolution d’une lignée de berlinettes à moteur V10 née avec la Gallardo (produite de 2003 à 2013) puis perpétuée avec la Huracan en 2014, la Tecnica y apporte un style plus en phase avec l’avenir de Lamborghini sans pour autant renier les fondamentaux des petites brutes de Sant’Agata Bolognese. Articulée autour de piliers d’un monde presque révolu, cette Huracan Tecnica est-elle pour autant un chef d’œuvre dépassé ? J’ai eu l’opportunité de le découvrir durant les 24 heures de Spa 2023. Une balade mémorable qui a répondu à beaucoup de questions et d’attentes.

J'ai aimé Lamborghini Huracan Tecnica

En temps normal, je ne suis pas un grand fan des voitures au design tarabiscoté ou trop agressif, mais dans le cadre d’une Lamborghini, les choses sont différentes car l’histoire, l’image et la cible le sont également. Et cette itération Tecnica de la Lamborghini Huracan apporte ce qu’il manquait d’équilibre et de maturité au dessin original. Au bout du compte, tout est question d’équilibre et la ligne de la Tecnica en est le parfait exemple. Le traitement du nez de la voiture change complètement la perception que l’on peut en avoir avec des éléments noirs qui allègent la proue et intensifient l’impression de mouvement, de fauve prêt à bondir qui sied à cette Lambo tandis que le petit aileron fixe à l’arrière vient « appuyer » la poupe et renforcer son assise visuelle, surtout de profil. Il s’agit certes de la plus sobre des Lamborghini récentes mais, à mes yeux, c’est sans conteste le plus réussie depuis belle lurette.

Bien entendu, ce qui fait tout le sel de cette Lamborghini Huracan ne tient pas tant à sa ligne qu’à ce qu’elle enveloppe : une pure propulsion animée par un V10 atmosphérique en position centrale arrière associé à une boîte robotisée à double embrayage. Le combo parfait ? Oui, 640 fois oui ! Alors, je ne doute pas une seconde que les Ferrari 488, F8 et 296 GTB ainsi que les McLaren 720 S ou Artura soient encore bien plus puissantes et performantes. Mais entre nous soit dit, la vélocité de cette Lamborghini Huracan Tecnica, qui reprend le V10 5,2 l de la Huracan STO avec ses 640 ch, est déjà telle que prétendre en exploiter le plein potentiel sur route ouverte implique de se mettre en danger ou de mettre les autres en danger. Dans ce cadre, quel intérêt y a-t-il à viser plus haut encore, si ce n’est à se gargariser dans les conversations du yacht club ou au énième trou d’un parcours de golf ? Cela soigne certainement l’égo, mais n’entretient pas forcément l’émotion. Et l’émotion, c’est justement LE point fort de cette Lamborghini Huracan Tecnica. Elle en déborde en toutes circonstances. Le sens du spectacle est inné chez elle et le bel canto un art de vivre pour ce V10 atmosféérique qui enchante par sa disponibilité, sa rondeur et son tonus. Surtout, sa nature « bio » en fait un allié de choix pour qui n’est pas pilote dans l’âme mais aime profiter d’une conduite en mode accéléré. La bande son accompagne et anticipe psychologiquement la poussée qui reste phénoménale. Rappelons qu’elle abat le 0 à 100 km/h en 3,2 s mais surtout, elle vous booste le rythme cardiaque à plus de 120 pulsations en une fraction de seconde.

Mais la Lamborghini Huracan Tecnica, ce n’est pas qu’un moteur qui chante merveilleusement bien et pousse sérieusement fort. C’est aussi un châssis idéal pour s’amuser sur de belles routes de campagne ! La suspension offre un excellent compromis entre le maintien de la caisse et l’amortissement des ondulations et déformations du revêtement. Elle n’est jamais sèche ni inconfortable – un certain Urus Performante pourrait en prendre de la graine – et l’équilibre naturel de la voiture permet de rentrer fort dans les virages avec une précision rassurante puis d’enrouler la courbe sur un filet de gaz avant de mettre le pied au plancher sans crainte d’une quelconque perte de motricité. La direction ne nécessite que des mouvements courts, directs et précis. Certes, cela déroute quand on a l'habitude de familiales à la direction à assistance électrique trop démultipliée, mais on se prend naturellement au jeu et la confiance est d’autant plus grande que le retour d’informations – que ce soit dans le volant ou les fesses – est très lisible et prévenant. On sent très vite quand la voiture s’approche de la limite et elle réagit de manière progressive, loin de la brutalité que pourraient suggérer sa ligne ou les rugissements du moteur. Si l’on n’est certes pas aux commandes d’un scalpel de Maranello ou Woking, on manipule tout de même un véritable katana au tranchant évident. Disons simplement que sa maîtrise nécessite moins d’expertise et de finesse du doigté que les deux autres et rend donc cette Huracan Tecnica plus abordable au commun des conducteurs, dont je fais partie.

Le dernier aspect ultra-positif de cette Lamborghini – mais ça vaut certainement pour la plupart des supercars – c’est sa cote de popularité auprès du public. Je n’ai pas manqué de donner un petit coup de gaz pour faire plaisir aux amateurs enthousiastes qui sirotaient quelque breuvage sur la terrasse d’un café, ou d’emmener à mes côtés ici un gamin là un jeune homme ou encore une grand-mère qui avaient tous en commun des étoiles dans les yeux et un sourire jusqu’aux oreilles. La passion automobile existe encore, l’attirance pour la belle mécanique perdure toujours et le plaisir de partager est magnifié par cet engin hors du commun qui marque la fin d’une ère : celle des véritables sportives pures, sans turbo, sans électrification, et presque sans filtre ! Ou plutôt avec un filtre polarisant qui magnifie les sensations authentiques que seules les automobiles d’exception peuvent distiller !

Je n'ai pas aimé Lamborghini Huracan Tecnica

Très honnêtement trouver des défauts à une telle automobile-passion tient de la gageure et ces derniers relèvent presque tous de l’appréciation suggestive – d’une personne qui n’a pas les moyens de s’offrir ce rêve sur roues – et sont donc très relatifs. De relativité il est encore question au sujet de l’interface utilisateur. Certes, l’écran « d’infodivertissement » n’est pas le plus convivial à manipuler mais au final, au volant de cet engin, le principal écran que l’on utilise s’appelle « pare-brise ».

Je regretterais juste que cette Lamborghini Huracan Tecnica ne dispose pas d’un espace de rangement suffisant que pour emmener en toute sécurité deux sacs de voyage pour partir une semaine en vacances à deux. Car toute super-sportive qu’elle soit, elle incite au voyage autant qu’à l’arsouille.

Je ne lui trouve véritablement qu’un seul défaut : elle n’est plus disponible, Lamborghini ayant annoncé que toute la production 2024 était vendue. Quand bien même gagnerai-je à la loterie qu’il me faudrait me tourner vers une « occasion » qui ne sera pas parfaitement configurée comme je le voudrais. Voilà qui écorche un peu le rêve… mais pas tant que ça.

Donc Lamborghini Huracan Tecnica

La Lamborghini Huracan Tecnica n’est évidemment pas LA super-sportive parfaite, ni la plus performante, ni la plus moderne. Mais elle constitue sans aucun doute LA plus pure de toutes et restera à jamais comme la dernière représentante d’une ère désormais révolue. Sans offense aux Porsche Cayman GT4 (RS) ou même 911 GT3 (RS), la Tecnica était bel et bien la dernière berlinette à moteur central atmosphérique de très haut vol estampillée d’un blason prestigieux. Peut-être même la dernière sportive à moteur V10 de l’histoire. Avoir eu le plaisir et le privilège d’en prendre le volant ajoute encore à l’émotion et l’amour que j’ai toujours eu pour ce modèle. Grazie per la bella macchina e bravo!