Essais blog / Qu’avons-nous pensé du Ford Raptor 3.0 V6 Ecoboost 2023

Soyons honnêtes : dans un monde devenu aussi polissé qu'électrifié, que vient faire un pick-up monstrueux doté d'un 3.0 V6 biturbo à essence qui consomme plus que de raison ? D'autant que la récente législation fiscale a considérablement réduit l'attrait pour ce genre de véhicule auprès d'un public qui ne peut plus justifier son utilisation professionnelle.

Un pick-up aussi imposant, avec près de 300 chevaux et plus de 400 Nm, frôle presque la provocation. Et mis à part quelques Dodge RAM importés en parallèle, souvent équipés d'une étiquette "LPG" sur leur benne, il n'a pas beaucoup de concurrents. Suis-je sorti indemne de cette semaine passée à essayer de maîtriser ce monstre sur des routes rendues glissantes par l'automne qui s'installe ?

J’ai aimé Ford Raptor 2023

Le besoin d'une marche et d'une poignée pour accéder à bord peut indiquer deux choses : soit je vieillis, soit le véhicule est vraiment élevé. Il y a sans doute un peu des deux. Je ne pense pas avoir perdu beaucoup de souplesse, mais j'étais quand même bien content de disposer de ces deux éléments pour accéder à un cockpit dans lequel, une fois installé dans de bons sièges, on a l'impression que plus rien ne peut nous arriver.

On est dans du costaud, du massif, du solide et de l'imposant. Les jantes ne mesurent que 17 petits pouces, mais elles permettent de loger des pneus tout-terrain au flanc très haut et renforcé, capables d'encaisser les pires traitements. Pour un pick-up de conception a priori rustique, le confort est étonnant (merci aux super amortisseurs Fox !), et la façon dont ces crampons destinés à griffer la terre et la caillasse martèlent l'asphalte dans un silence relatif est étonnante. Le Raptor est donc plus raffiné qu'il n'y paraît.

Le moteur et la boîte automatique à 10 rapports se complètent parfaitement, tandis que les différents modes de conduite calibrent la transmission intégrale de manière prédéfinie. Il est également possible de verrouiller les différentiels avant et arrière pour s'extraire d'une mauvaise situation, ainsi que d'opter pour une gamme de rapports courts au besoin. Le Ford Raptor 2023 est ainsi prêt à affronter toutes les situations, même si pour exploiter pleinement le mode Baja, il faudra trouver un désert ou une sierra, ce que je n'ai pas trouvé même dans les Ardennes profondes. Ah, frustration ! Avec plus de 5,2 mètres de long et plus de 2,5 tonnes à gérer, mon rond-point habituel n'a pas suffi.

Je n’ai pas aimé Ford Raptor 2023

Les routes grasses et humides de cet automne naissant ont révélé un véritable problème de motricité en mode 2 roues motrices (arrière) : il suffisait de regarder l'accélérateur pour provoquer un décrochage, y compris en ligne droite et même à plus de 100 km/h. Heureusement, l'électronique veille... la plupart du temps. Mais un moteur débordant de couple, un arrière très léger, un centre de gravité élevé, des pneus à crampons  et donc à faible adhérence sur l’asphalte gras et une suspension, somme toute, assez rustique, mettent à mal un système de contrôle de traction qui a du travail et provoquent des réactions qui peuvent surprendre, même à vitesse modérée. Cela se joue sur quelques millimètres de course de la pédale de droite. Donc, prudence.

La solution consiste à passer en mode automatique, par lequel la transmission intégrale s'enclenche automatiquement en cas de besoin. Et dans les conditions de mon essai, ce besoin était fréquent. En résumé, il ne s'agit pas d'un véhicule à mettre entre toutes les mains. Une expérience est requise. Après une semaine à essayer de garer ce monstre dans ma petite ville natale, j'étais presque content de retrouver une voiture "normale" et facile à utiliser au quotidien. Et plus sobre. En effet, ce Raptor a exigé au minimum 14,5 litres de sans plomb aux 100 kilomètres. Ma carte d'essence a fait un infarctus et mon patron m'a convoqué. Routine !

Mais ce que je comprends encore moins, étant donné qu'il s'agit d'un véhicule capable de faire face à des tâches difficiles et de supporter tous les traitements, c'est sa capacité de remorquage limitée à 2,5 tonnes, alors que d'autres pick-up moins extrêmes acceptent 3,5 tonnes. Je connais un professionnel amateur de pick-up qui aurait été tenté, mais qui a renoncé en raison de cette capacité de remorquage limitée.

Et donc Ford Raptor 2023

J'ai adoré ce côté décalé, provocateur et extrême du Ford Raptor 3.0 V6. Près de 300 chevaux dans un pick-up utilisé dans de vastes espaces et des terrains très exigeants, c'est impressionnant. Mais sur des autoroutes mouillées et dans des centres-villes étroits, il est plus difficile à justifier autant qu’à utiliser. De plus, dans ces conditions humides, passer en mode transmission intégrale est indispensable pour éviter d'être surpris par l'abondance de couple et un arrière très léger.

Non, je ne me vois pas conduire un Raptor au quotidien, c'est trop instable, contraignant et coûteux (en essence, taxes et prix d'achat : 61 000 euros, hors TVA). Ce jouet est certes amusant, mais il est cher pour un jouet qui ne peut pas tracter autant que des concurrents plus modestes. Cependant, je comprends qu'on puisse tomber sous son charme...