Edito / Belles et rebelles...

Ne dit-on pas des barouds d’honneur qu’ils sont souvent les plus beaux? C’est le dernier verre entre amis au terme d’une bonne soirée. C’est le dernier resto en charmante compagnie avant un confinement dont on pensait qu’il ne durerait que quelques semaines. C’est cette volonté de prolonger l’instant présent sachant que, demain, ce sera peut-être fini. Savourer avant de passer à autre chose. Mordre la vie à pleines dents avant des lendemains qui nous plongeront dans l’inconnu. C’est au travers de ce prisme qu’il convient d’analyser les lancements quasi simultanés de deux modèles qui resteront collectors dans l’âme des passionnés, comme un chant du cygne avant la marée électrique à laquelle, visiblement, nous n’échapperons pas. Il en va ainsi d’Alfa Romeo, qui relance l’appellation mythique GTA et GTAm, ainsi que son célèbre trèfle à 4 feuilles, pour une Giulia qui a visiblement touché le cœur et les sens de notre essayeur, pourtant traditionnellement peu porté sur l’enthousiasme béat. Avec elle, Alfa nous rappelle qu’il sait faire des sportives d’exception, réellement enthousiasmantes, à tel point que, toutes proportions gardées, cette explosive Giulia GTA 2021 est sans doute la plus digne héritière des célèbres Giulia GTA(m) du milieu des années 60. Certes, ces dernières étaient quasiment deux fois moins lourdes (800 kg contre 1.500 environ), mais aussi 2,5 fois moins puissantes (220 ch contre 540). L’esprit est le même dans une époque qui a changé: la sportivité sans concession en ligne de mire. Autre résurrection toute temporaire: la Maserati MC20. Il y avait des décennies que le Trident n’avait plus sorti une sportive aussi compétente et aboutie. Les années d’errance et d’approximation semblent ainsi avoir enfin été balayées et la MC20 prouve en tout cas que la compétence n’a pas déserté Modène. Mais quels lendemains pour ces deux sportives d’exception? Visiblement, un statut d’apothéose, de bouquet final avant de passer à… autre chose. À des lendemains électriques, par exemple. Un passage obligé auquel nul ne pourra se soustraire, même Ferrari et Lamborghini l’admettent aujourd’hui. Maserati a d’ailleurs confirmé cette orientation lors du lancement de sa MC20: l’avenir est aux électrons et cela semble inéluctable. On peut le regretter, ça n’y changera rien. Il est donc clair que les lendemains qui nous attendent ne chanteront plus les mêmes vocalises que ces V6 italiens, dont, outre la sonorité, on se réjouit de leur côté tellement politiquement incorrect. Deux autos belles et si rebelles. Raison de plus pour en profiter tant qu’on peut encore…