Au-delà de leur rigueur journalistique et de leur point de vue de professionnels de l’automobile, les membres de la rédaction sont avant tout des automobilistes et des citoyens lambda. Dans « Rédacteurs sans filtre », c’est le cœur qui s’exprime avant tout ! Aujourd’hui, Hans se penche sur l'entêtement des Allemands pour défendre leur industrie automobile thermique.
Lisez aussi - Rédacteur sans filtre - tous les sujets
L'article paru dans le magazine allemand Manager Magazin à la fin de l'année 2022 ne donnait pas une belle image de la fierté nationale. Il y était question des gènes conservationnistes présents dans l'ADN de nos voisins de l'Est, et de la façon dont cela colle parfois aux roues des grands constructeurs automobiles.
Il y était notamment question des difficultés rencontrées par Mercedes en Chine pour vendre son EQS, qui est pourtant la pièce maîtresse de sa gamme. Nous continuons à penser que les écrans géants à bord de la Classe S électrique ne servent qu'à impressionner l'important acheteur chinois. Après avoir sondé les clients, les Allemands ont été consternés de constater qu'ils considéraient déjà ce soi-disant Hyperscreen comme obsolète.
Il n'est même pas incompréhensible de placer à côté le système multimédia d'apparence beaucoup plus moderne d'une Nio, par exemple, deux fois moins chère, et l'on peut comprendre pourquoi les Chinois ont laissé cette chère allemande derrière eux. Moins d'un an après son lancement, Mercedes s'est empressée de réduire le prix de vente de 30.000 €, du jamais vu pour une Sonderklasse.
Après avoir interrogé les clients, les Allemands ont été consternés de constater qu'ils considéraient déjà ce soi-disant Hyperscreen comme obsolète.
D'un point de vue européen, on pourrait penser qu'une voiture de luxe doit être dotée d'un châssis exceptionnel, d'une boîte de vitesses automatique douce comme la soie, d'un cuir exquis, etc. Mais l'automobiliste chinois veut surtout un smartphone à conduire, avec au moins une fonction selfie, et idéalement un système de karaoké.
Vous avez bien lu : karaoké.
Là-bas, les tentes de chant Les Chinois adorent chanter, même sur la route. Pourquoi la nouvelle BMW 7 est-elle équipée d'un écran géant au plafond ? Non pas parce que le grand manitou assis à l'arrière veut participer à des réunions vidéo, mais pour se délecter d'un karaoké sur le pouce.
Et cela ne va jamais assez vite. Erwin Gabardi, le grand patron de la coentreprise entre le groupe Volkswagen et le constructeur automobile chinois Hefei, a déclaré dans une interview l'année dernière : "Nos concurrents chinois peuvent intégrer une fonction karaoké dans une voiture en 2 ou 3 mois, alors qu'il nous faut un an. (...) Nous devons mettre en œuvre les souhaits des clients plus rapidement. Nous ne pouvons plus discuter de chaque détail avec le siège en Allemagne".
Cette attitude de prudence nécessaire rappelle beaucoup la saga des carburants synthétiques. Le groupe VW pense ainsi avoir sauvé le moteur à combustion interne - et donc la nation - en mars dernier, en sapant sans ménagement une décision européenne prise par l'intermédiaire du ministre allemand des transports.
Il s'est ainsi tiré une balle dans le pied.
La grande force de l'interdiction de vente des moteurs à combustion interne était précisément qu'elle était claire comme de l'eau de roche et absolue, sans aucune exception. Un ordre de marche clair avec lequel l'industrie pouvait se mettre au travail : rendre l'automobilité sans fossile pour tous, à un prix abordable, et rendre ainsi l'Europe moins dépendante des producteurs de pétrole.
La grande force de l'interdiction de vente des moteurs à combustion interne était précisément qu'elle était claire et absolue, sans aucune exception.
Cette exception pour les moteurs à combustion fonctionnant avec des carburants synthétiques ouvre toutes les portes aux solutions technologiques timides qui ne profitent pas aux consommateurs. Le PHEV actuel, coûteux et inefficace, illustre bien le fait qu'un gouvernement doit tenir l'industrie en laisse, sous peine de provoquer un véritable gâchis.
Un désordre qui pourrait à terme affaiblir la position concurrentielle de l'industrie automobile allemande (et donc européenne). Les Chinois, quant à eux, donneront le ton avec le sourire.
Ce karaoké et ce carburant synthétique : d'une certaine manière, c'est deux fois la même histoire.
NE MANQUEZ RIEN DE l’ACTU AUTO!
Derniers modèles, tests, conseils, évènements exclusifs! C’est gratuit!